Section 3G
Modes de vie des occupants des Bâtiments 6, 7 et 8
(Période 2g-2i - 800-1000)
Philippe Husi, James Motteau

Les traces ténues de bâtiments à architecture de bois et/ou de terre, se succédant entre le 9e et le 10e siècle, auxquels ont pu être associées, sans preuves plus précises que chronologiques, une série de fosses de rejets domestiques, correspondent à la dernière occupation connue du site pendant la Période 2, profondément perturbée par la construction de la résidence du 11e siècle.

La vaisselle en terre cuite (PH)
Mise au jour dans des niveaux d’occupation extérieure, elle s’inscrit dans un répertoire typologique totalement médiéval avec la disparition de toute référence à un héritage antique : une omniprésence des pots, une forte présence des cruches et une quasi-disparition des formes ouvertes, avec une dominante des productions claires et particulièrement blanches, traduisant un usage presqu’exclusif de l’atmosphère oxydante (Randoin 1981 ; Husi 2008d,e,f ; dir. 2013). Comme pour les périodes précédentes, les pots servent principalement, mais pas exclusivement à la cuisson, ainsi que l'’atteste la présence des traces de passage au feu laissées sur les récipients (Pl. 3G, Fig. 2). En revanche, les vases liés au service des liquides, quasi absents au début du haut Moyen Age, sont maintenant bien attestés.
La grande qualité de la vaisselle associée à ces bâtiments successifs s’observe par la forte présence, d’une part de cruches peintes et d’autre part de coupes, d’une tasse et de cruches glaçurées. Bien qu’ostentatoire, l’usage de la peinture, facile à appliquer et peu coûteuse, est une technique courante à la fin du haut Moyen Age dans le Nord-Ouest de l’Europe. En revanche, l’usage de la glaçure semble un meilleur marqueur social. En effet ne peuvent être négligés ni le surcoût du récipient engendré par l’achat du plomb ni un savoir-faire particulier de la part du potier, indispensable à la réalisation d’une poterie glaçurée. En se référant aux principaux sites ayant livré des récipients de ce type dans le nord-ouest de l’Europe, y compris les autres sites de Tours, on constate la présence de plusieurs indicateurs d’un matériel de qualité : la précocité dans l’usage de cette technique déjà soulignée pour le bâtiment 5 ; l’importance quantitative de ces productions qui représentent presque 15 % de la totalité du matériel de ces contextes (47 individus sur un total de 329).
Ces éléments font du site l’un des témoins les plus précoces et les plus représentatifs de la réapparition d’une technique oubliée depuis l’époque romaine (Husi 2006b ; 2010).

La vaisselle de verre (JM)
Elle reste dans la lignée de celle du bâtiment 5, avec une part croissante du fondant potassique tout en conservant des pièces à fondant sodique. Les fragments identifiés appartiennent à la verrerie de table, gobelets et coupes principalement, alors que les contenants sont presque inexistants (Pl. 3G, Fig. 3). La qualité de la verrerie simplement soufflée à la volée peut être considérée comme ordinaire dans 85 % des cas, les décors moulés et rapportés ou la combinaison des deux indiquant un statut légèrement supérieur. La définition du luxe convient bien aux gobelets au bandeau en verre doublé, ce qui forme deux parties de teintes différentes, panse et bandeau, mais la verrerie de cette période 2g ne présente pas de fragments filigranés remarquables comme ceux trouvés à Saint-Denis (Meyer et Wyss 1989) ou sur d'autres sites de Tours (graphiques "Bâtiment 6, verre" et "Occupation extérieure 2g, verre").

Mobilier et équipement domestique (JM)
Les profils des groupes de petit mobilier diffèrent nettement entre le bâtiment 6 (avec un équipement domestique prédominant) et les fosses des autres structures (Pl. 3G, Fig. 4). Les objets sont d'usage courant : seuls se démarquent deux fermoirs en bronze doré. Une occupation purement domestique est remise en cause par la présence de cinq fers à cheval.
Le mobilier domestique au sens large exhumé de ces fosses s’inscrit dans la droite lignée de celui déjà présenté pour le bâtiment 5. Alors que les objets, exception faite des fermoirs, ne présentent aucune originalité, certains récipients en verre et surtout en terre cuite sont d’une grande qualité, traduisant la présence d’une population aisée, la présence de fers à cheval pouvant témoigner d’activité militaire.