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Analyse critique de la mise en oeuvre des principes du développement territorial durable dans les zones rurales marginalisées du Nordeste Brésilien : réflexions à partir du cas de la région du Carati
Le terme de développement territorial tel qu’il est utilisé dans le contexte brésilien renvoie au modèle théorique du développement endogène. Apparu dans les années 80, ce modèle se fonde sur une critique des modèles de croissance centralisés et interventionistes. Ceux-ci partaient du principe que le progrès technologique et l’ingénierie pouvaient radicalement modifier les conditions locales du développement à partir de démarches volontaristes et planifiées.. En rupture avec ces approches, les stratégies du développement territorial reposent sur l’idée que chaque unité territoriale doit prendre les initiatives et adopter les moyens nécessaires à l’activation de son potentiel de ressources endogènes. Dans le contexte latino-américain et plus encore brésilien, on observe donc une totale remise en question des théories de développement précédentes : les propositions de développement ne doivent plus s’appliquer verticalement mais de façon horizontale, de même qu’elles ne doivent pas chercher à importer des ressources exogènes mais à valoriser les potentialités locales. Les stratégies du développement endogène supposent enfin un changement dans la considération et la définition des ressources. Il s’agit en effet de transformer des aspects traditionnellement considérés comme des handicaps en ressources susceptibles d’être valorisées, des valeurs négatives en valeurs positives. Le modèle du développement endogène est supposé assurer aux territoires, même périphériques, une durabilité à la reproduction de leurs systèmes productifs en réduisant leur dépendance vis à vis des marchés extérieurs et en leur permettant d’initier eux-même leur processus de croissance économique. Apparu au Brésil à partir du début des années 90, en même temps que les débats sur la place et le devenir de l’agriculture familiale, le développement territorial a eu tendance à être considéré comme « la » solution susceptible revaloriser l’image des régions les plus isolées et notamment du Nordeste semi-aride. Tel est le constat qui se dégage de ma recherche de DEA dont la présente proposition de thèse assure le prolongement . Cette investigation initiale a permis de dresser un premier bilan et une analyse critique des initiatives et des réalisations de l’organisation locale en faveur de l’agriculture familiale caririense, justement menées dans l’optique d’un développement territorial durable. Ce travail a mis en évidence la pertinence du concept de développement territorial durable, en tant que cadre de référence théorique pour l’action locale, mais aussi la nécessité d’une réflexion sur les modalités de son application à la réalité nordestine. En effet, si cette recherche a permis de repérer l’émergence d’un processus de développement territorial, elle a aussi montré que ce processus se limite toutefois à l’échelle micro-locale et n’intègre que très partiellement la dimension économique. Cette omission de la dimension économique paraît due à une interprétation erronée de la part des acteurs locaux du concept structurant leur action.
Le but de la thèse est donc de réaliser une analyse critique de la façon dont sont mobilisés les principes du développement territorial durable ainsi qu’un diagnostic des réalisations auxquelles ils aboutissent dans la région du Cariri (Etat de la Paraiba - Nordeste du Brésil). Au-delà du territoire d’observation, c’est une réflexion plus générale sur les implications concrètes de la perspective du développement territorial durable dans les zones rurales marginalisées qui est visée. Par ailleurs, le projet de recherche doctorale, tel qu’envisagé ci-dessus, entend bénéficier d’une synergie entre les objectifs issus de mon travail de DEA et ceux du projet franco-brésilien associant les Universités de Tours, en France, et de Campina Grande et de Florianopolis, au Brésil, projet s’inscrivant dans le cadre d’un accord CAPES/COFECUB . Le projet de coopération franco-brésilienne a pour ambition de réaliser un diagnostic le plus large possible des déterminants des dynamiques de développement local induites par des initiatives innovantes et intégrées de promotion du développement durable, que celles-ci émanent de la société civile, de l’Etat ou du marché. Il prétend également évaluer les conditions de viabilité des projets de développement des espaces ruraux brésiliens qui relèveraient d’une démarche de développement durable. Ma recherche doctorale s’inscrit donc dans une réelle complémentarité avec une des opérations importantes de coopération internationale que mène le Centre de Recherches VST, et plus particulièrement le groupe « Aménagement et Recomposition Territoriale » , au sein de l’UMR CITERES.
Méthodologie
Le projet CAPES-COFECUB a un vaste champs d’application au sein duquel prend place la région du Cariri de la Paraiba (Nordeste du Brésil). La thèse comportera une analyse complète des actions menées dans cette région, plutôt que par échantillonnage afin d’avoir une vision exhaustive de la zone d’étude et des opérations de développement territorial durable, qui y sont conduites par l’ensemble des acteurs publics ou non (Etat fédéral, Etat de la Paraïba, municipalités, syndicats, mouvements sociaux ...). Une première phase de la recherche sera réservée à l’identification d’acteurs clés ayant une connaissance détaillée du terrain avant de réaliser de nombreux entretiens en portugais (langue maîtrisée) avec les diverses catégories d’acteurs locaux. Ce travail projette la réalisation d’une analyse systémique de l’ensemble des conditions favorisant l’émergence de territoires de développement. Ceci implique donc l’intégration des dimensions économique, sociale mais également environnementale, ce qui suppose de favoriser le dialogue interdisciplinaire.
Déroulement de la recherche et plan de travail :
Cinq étapes de recherche sont envisagées : · septembre 2004- mai 2005 recherche bibliographique en France sur les concepts mobilisés · Juin 2005- septembre 2005, premier séjour au Brésil : identification des acteurs clés, choix des terrains, première approche des réalités conceptuelles et empiriques brésiliennes. · Septembre 2005- mars 2006, dernières recherches bibliographiques en France, confrontation avec les informations recueillies au Brésil · Mars 2006- février 2007, séjour long au Brésil, réalisation d’une évaluation territoriale cartographie des expériences de développement territorial durable et/ou de l’émergence de territoires de développement · Mars-septembre 2007 : rédaction finale
Soutenance prévue : septembre 2007
Moyens mobilisés par la recherche :
Les moyens mobilisés pour cette recherche sont ceux du Laboratoire CITERES. Il s’agit notamment des moyens informatiques nécessaires aux réalisations cartographiques impliquées par la recherche. L’accord CAPES/COFECUB ne permettant pas de financer des missions de longue durée, l’obtention d’une bourse d’aide à la mobilité internationale devrait permettre de faire face aux frais entraînés par les deux séjours prévus au sein de l’Université Fédérale de Campina Grande et sur le terrain dans la région du Cariri.
La thèse bénéficiera de l’appui scientifique apporté par les équipes brésiliennes de Florianopolis et de Campina Grande, participant au projet CAPES/COFECUB N° 449/04 (opp cit.).