Accueil du site > Doctorants > Delhomme Bertrand
COST
Sociologie des carrières enseignantes
par
- 22 novembre 2018
Thèse débutée en 2018
Selon un récent rapport du Conseil National de l’Evaluation du Système Scolaire (CNESCO) du 27 septembre 2016, l’affectation des enseignants débutants dans des établissements socialement défavorisés (notamment ceux labelisés « Education Priorataire ») pourrait être l’un des mécanismes explicatifs du rôle amplificateur de l’Ecole sur les inégalités sociales. Or, à travers des méthodes quantitatives et qualitatives, de nombreuses recherches (Becker 1951, Léger 1981, Chapoulie 1982) viennent confirmer un modèle dominant de carrières chez les enseignants : entrée dans le métier au début de la carrière professionnelle avec une affectation dans un établissement socialement défavorisé aux conditions de travail difficiles, puis évolution vers des établissements socialement favorisés aux conditions de travail perçues majoritairement plus faciles par les enseignants dans la suite de leur carrière (Chapoulie, 1982). Néanmoins, d’autres recherches appuient l’idée de modèles de carrières différents chez les enseignants : souhait des jeunes enseignants d’un retour vers des établissements socialement défavorisés en milieu de carrière pour susciter une nouvelle mobilisation pédagogique face à la routinisation des taches pédagogiques (Van Zanten, Rayou, 2004) ou encore adaptation aux établissements socialement défavorisés et crainte d’enfants « gâtés » dans les établissements socialement favorisés (Becker 1951).
En outre, nous connaissons de profondes évolutions du contexte depuis les années 1980 qui pourraient venir contester ce modèle unique de carrière. Tout d’abord de nombreuses politiques publiques ont tenté de rendre attractifs les établissements labélisés « Education Prioritaire » à travers plusieurs incitations (primes, bonification de points d’affectation, valorisation de la carrière, décharges horaires, etc).
Plus globalement, d’autres éléments pourraient entraîner des évolutions plus larges au sein des carrières enseignantes : entrée tardive dans le métier après une première expérience professionnelle différente, sortie précoce pour d’autres secteurs professionnels. La seconde massification qu’a connu le système scolaire (Chauvel, 1998) a profondément transformé les conditions d’exercice du métier pouvant entraîner des sorties précoces. Egalement, l’augmentation de la précarisation des parcours professionnels (Larquier et Remillon, 2008) pourrait rendre plus attractif le métier d’enseignant, notamment après une première expérience professionnelle dans d’autres secteurs. L’ensemble de ces éléments implique la nécessité d’un nouvel état des carrières enseignantes, ce que proposera ce travail. Dans un premier temps, nous nous attacherons à questionner la démographie du corps enseignant en observant l’évolution des entrées ou sorties dans le métier d’enseignant (nous observerons plus particulièrement l’évolution des enseignants de « seconde carrière » et les sorties précoces). Dans un deuxième temps, nous questionnerons l’existence de modèle-types dans les carrières enseignantes du premier et du second degré en y intégrant une dimension comparative et territoriale. Enfin nous cherchons à apporter de premières explications à la différenciation des carrières chez les enseignants en étudiant notamment l’impact du genre et de l’origine sociale qui ont toutes les chances d’être des facteurs majeurs de différenciation.
Nous nous appuierons pour ce faire sur une combinaison de méthodes quantitatives (sur deux bases de données : l’Echantillon Démographique Permanent, et un fichier administratif en panel du Ministère de l’Education Nationale) et de méthodes qualitatives (notamment les récits biographiques).