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Espaces et projets à l’épreuve des affectsPour une reconnaissance du rapport affectif à l’espace dans les pratiques d’aménagement et d’urbanisme
Thèse dirigée par : M. Denis Martouzet, Professeur d’aménagement de l’espace et d’urbanisme, Université François - Rabelais Tours Jury : M. Simon Laflamme, Professeur de sociologie, Université Laurentienne - Sudbury (Ontario) M. Olivier Ratouis, Professeur d’aménagement de l’espace et d’urbanisme, Université Michel de Montaigne - Bordeaux 3 M. Philippe Mathis, Professeur d’aménagement de l’espace et d’urbanisme, Université François - Rabelais Tours M. Thierry Ramadier, Chargé de recherches CNRS en psychologie environnementale, Université de Strasbourg Mme Joëlle Salomon Cavin, Maître assistante en géographie, Université de Lausanne L’affectivité, les émotions, les sentiments sont des thématiques encore relativement peu explorées dans le champ des sciences de l’espace, et pourtant de plus en plus nombreux sont les auteurs qui soulignent l’intérêt, et même la nécessité, de surmonter la difficulté de leur intégration. Souscrivant pleinement à cet objectif, le présent travail de thèse pose comme hypothèse fondatrice que la dimension affective de la relation de l’homme à son environnement, son rapport affectif à l’espace, depuis les mécanismes qui président à sa construction jusqu’à ses conséquences pratiques, constituent une connaissance utile à la science de l’aménagement des espaces. À travers ce travail nous avons donc cherché à mettre en lumière les mécanismes de type affectif, en lien avec les valeurs, les préférences, les attitudes, qui sont en mesures d’intervenir à la fois sur les représentations, les décisions et in fine sur les actions qui participent aussi bien des logiques géographiques au fondement de l’agencement de l’espace des sociétés, que des logiques projectives propres aux pratiques de transformation intentionnelle des espaces habités. En nous focalisant, dans un premier temps, sur la dimension spatiale de la relation affective entre l’individu et son environnement, à l’échelle biographique, nous avons pu montrer que la relation affective à l’espace était une dimension conséquente de l’organisation des espaces et qu’elle participait plus largement de l’agencement des spatialités individuelles et collectives. L’enquête mise en œuvre sur le quartier nouvellement construit des Deux-Lions (Tours) a permis de mettre au jour le modèle dynamique et relationnel qui participe de la construction du rapport affectif à l’espace chez les habitants. Nous avons également pu mesurer les différentes composantes de la relation affective, ses dimensions temporelles, spatiales, sociales, et noter l’influence du rapport affectif à l’espace sur la perception et la représentation de l’espace. Nous avons souligné les différentes modalités du rapport affectif à l’espace : ancrage, enracinement, attachement, sentiment d’appartenance, et décrit les mécanismes identitaires qui leurs étaient sous-jacents. En outre, nous avons pu donner une image cartographique de ce réseau constitué d’attachements, d’ancrages, d’enracinements, d’appartenances, de rejets et de ruptures, et souligner ainsi le poids des dynamiques émotionnelles, entre confrontation et évitement, dans le jeu proxémique entre mise à distance et mise à proximité. Basculant d’une approche diachronique, centrée sur l’individu et son parcours de vie, à une approche synchronique centrée sur le lieu, nous avons pu, dans un second temps, démêler les dimensions individuelles et sociales, ainsi que leur étroite intrication, dans la construction du rapport affectif à l’espace. Le travail d’investigation mené auprès des habitants d’un espace périphérique de l’agglomération de Tours, le secteur Rolland-Pilain (Chambray-lès-Tours), et des opérateurs amenés à intervenir sur ce même espace dans le cadre d’un projet d’aménagement, nous a donc permis de mieux comprendre les conditions d’émergence du rapport affectif à l’espace, qui produisent le besoin idéel et/ou matériel de se rapprocher de certains espaces, certaines idées d’espaces, ou à l’inverse les mécanismes qui en induisent l’éloignement. Dès lors, nous avons pu envisager l’influence de ces dynamiques affectives sur le projet d’aménagement et d’urbanisme, lorsque inévitablement l’intervention sur l’espace suscite et implique que l’émotion est partie intégrante du processus de structuration de l’action collective. Nous avons en ce sens pu éclairer ce que pourraient être les prémisses d’une approche émorationnelle de l’action d’aménager l’espace. Nous avons vu en particulier que les émotions pouvaient non seulement bloquer mais aussi aider dans le cadre de la co-construction de l’action d’aménager l’espace, à condition de mettre en œuvre les modalités de reconnaissance du rapport affectif à l’espace. De la sorte, nous avons pu dégager le fondement rationnel de la prise en compte des émotions et, dès lors, suggérer des pistes pour l’intégration opérationnelle de la donnée affective dans la conduite du projet d’aménagement. Nous avons ainsi pu montrer en quoi les évolutions paradigmatiques en matière d’aménagement des espaces et d’urbanisme, de la planification au projet, s’inscrivaient dans une logique nécessitant la prise en compte des dynamiques émotionnelles, tant au niveau du rapport des individus à l’espace, que du point de vue de la conduite de l’action sur l’espace.
Voir en ligne : http://tel.archives-ouvertes.fr/tel...